Chute de l’euro (1/3)

Les capitaux désertent la Zone euroLes capitaux désertent la Zone euro

La situation est inédite. La Zone Euro fait grise mine dans un contexte géopolitique tendu. Rien d’exceptionnel me direz-vous. La chute de l’euro est habituelle et son effondrement a déjà été annoncé de nombreuses fois. Malgré cela, la monnaie unique existe toujours.

Pourtant, il faut reconnaître que la situation est exceptionnelle. La Banque centrale européenne s’est embourbée dans une voie qui semble sans issue. Les citoyens européens risquent d’être les grands perdants.

Que peut-on attendre de la situation économique ? Que deviendront nos épargnes ? Comment en est-on arrivé là ?

Pour donner quelques éclairages à ce grand méli-mélo politico-économique, nous avons décomposé notre décryptage en 3 articles distincts.

  1. Chute de l’euro
  2. La Banque centrale européenne face à l’inflation
  3. L’inflation – la nouvelle donne européenne

Dans cet article, nous nous concentrons sur la tendance baissière de l’euro. Avant d’aller plus loin dans l’analyse des causes, il est nécessaire de faire un premier constat et décrire les conséquences pour les consommateurs de la Zone euro, les résidents suisses et les frontaliers.

Sommaire :

 

Chute de l’euro – tendance baissière 2022

L’euro poursuit sa tendance baissière. La monnaie unique atteint des seuils historiquement bas. Que l’on compare avec le franc suisse ou le dollar, le cours de l’euro est proche de la parité, voire en dessous.

EUR/USD
Source : EUR/USD depuis tradingview.com

EUR/CHF
Source : EUR/CHF depuis tradingview.com

 

Les conséquences pour les économies européennes

La tendance à la baisse de l’euro n’est pas nouvelle. En revanche, les tensions géopolitiques actuelles viennent renforcer les craintes des investisseurs.

La crise énergétique qui menace le vieux continent risque d’être la goutte de pétrole qui fait déborder le baril. Les analystes considèrent sérieusement un risque de récession pour cet hiver dans la Zone euro. Le FMI a également fait part de ses inquiétudes.

Des importations qui coûtent plus cher

La baisse du cours de l’euro ne pouvait pas tomber plus mal qu’en période d’inflation. Dans leur ensemble, les pays européens sont de grands importateurs.

Les coûts des produits étrangers seront doublement plus chers pour les consommateurs européens. D’abord en raison de la hausse générale des prix, ensuite parce que l’importation des produits se fait en US dollar et que celui-ci poursuit sa hausse par rapport à l’euro.

C’est donc directement le pouvoir d’achat des Européens qui diminue. Le consommateur est pris en étau entre l’augmentation des coûts d’importations et la hausse générale des prix.

De maigres bénéfices sur l’exportation

Certains économistes suggèrent que la baisse du cours est une bonne nouvelle pour les exportations. Il est vrai que mécaniquement, l’affaiblissement d’une monnaie tend à booster les exportations.

Cependant, pour booster des exportations, encore faut-il que ces exportations existent. En Allemagne, l’argument peut se comprendre. Mais en France, le bilan est plus mitigé. Les secteurs exportateurs sont peu nombreux et très spécifiques – le luxe, le vin, le champagne. Ce sont des domaines moins sensibles aux prix.

Pour enfoncer le clou davantage, notons que les sanctions à l’encontre de la Russie ont fermé un large marché extérieur. Les Européens ont suivi les trains des sanctions américaines. L’augmentation du prix des hydrocarbures, en réaction aux sanctions, va contribuer à alourdir la note. Pour beaucoup, l’approvisionnement énergétique n’est pas assuré.

 

Pourquoi l’euro chute ?

La Banque centrale européenne a pour mission de maintenir l’inflation aux alentours de 2% en Europe. Aujourd’hui, la hausse des prix s’approche des 10%.

Inflation dans la Zone euro


Inflation de la Zone euro en 2022
Source : www.aa.com.tr/fr

L’inflation atteint 6.6% en France, 8.5% en Allemagne, et plus de 20% dans les pays baltes. Elle arrive dans un contexte social déjà tendu par ailleurs. C’est le cas aux Pays-Bas où les agriculteurs ont violemment manifesté contre des mesures écologiques de limitation de l’élevage bovin. Les gouvernements européens les plus touchés vont tenter d’éviter la contagion sociale.

Pour combattre l’inflation galopante, la Réserve fédérale américaine (FED) a décidé d’augmenter ses taux d’intérêt de manière progressive. Elle a d’ores et déjà augmenté de 225 points de base cette année. Et d’autres hausses sont encore attendues par les marchés.

Pourquoi augmenter les taux pour contrer l’inflation ?

L’idée est simple. L’inflation est une hausse générale des prix. Le prix des biens et services est élevé car les chaînes de production ont été fragilisées par la pandémie et l’augmentation du prix de l’énergie. Augmenter les taux d’intérêt, permet de décourager les emprunts bancaires. En diminuant la consommation, on diminue la demande sur les biens et services, ce qui permet de faire baisser leur prix.

Les décisions timides de la BCE

Contrairement à son homologue américaine, la BCE est restée muette. Ce n’est que récemment, qu’elle a timidement augmenté ses taux de 25 points de base. La presse a été impressionnée car elle s’attendait à moins que cela, mais il est évident que cette hausse est loin d’être suffisante.

C’est précisément cette absence de réaction de la BCE qui plombe le cours de l’euro. En effet, en augmentant si peu les taux d’intérêt, la BCE a créé un fort différentiel entre les taux d’intérêt américains et européens.

Par conséquent, les agents économiques qui investissent sur le marché des devises ont massivement reporté leurs capitaux sur le dollar qui leur assure un meilleur rendement. C’est précisément cette fuite des capitaux qui tire l’euro vers le bas et renforce le dollar.

Couplées à la crainte d’un black-out énergétique européen, les décisions de la BCE viennent mettre du plomb dans l’aile de la monnaie unique.

Ainsi, en plus d’être totalement insuffisante pour combattre une inflation à 10%, l’augmentation timide des taux par la BCE contribue à rogner le pouvoir d’achat et l’épargne des citoyens de la Zone euro.

Mais alors, pourquoi la BCE n’agit-elle pas autrement ? Et bien tout simplement, parce qu’elle ne peut pas faire autrement. Elle n’a tout simplement pas d’autres choix. Nous verrons dans notre prochain article, les raisons qui ont conduit la politique monétaire européenne dans cette impasse.

 

Conséquences pour l’économie Suisse

Dans ce contexte, le franc suisse n’a pas besoin d’une politique monétaire particulièrement virulente. Il joue son rôle de valeur refuge. La parité EUR/CHF est quasiment unique depuis la création de l’euro. C’est dire la situation exceptionnelle dans laquelle se trouve le marché des changes.

Pas de réelle inquiétude à avoir toutefois, la différence de valeur entre le franc suisse et l’euro vient également équilibrer une différence d’inflation entre les deux pays.

Bonne nouvelle pour les résidents

Pour finir ce constat sur de bonnes nouvelles, les résidents suisses vont bénéficier d’un taux de change très favorable avec l’euro. C’est le moment idéal pour aller faire ses courses en France. Les vacanciers qui partent dans un pays de la Zone euro pourront également s’offrir quelques extras.

Bonne nouvelle pour les frontaliers

Rare ont été les fois où le change entre les francs suisses et les euros a été si profitable. Une très bonne nouvelle donc pour les frontaliers qui pourront rapatrier leur salaire à un taux exceptionnel.

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