7 enjeux et 7 résolutions pour les Frontaliers en 2020

Bonne année 2020 pour le Frontalier !Bonne année 2020 pour le Frontalier !

Ces dernières années, le Frontalier, à cheval entre la Suisse et la France, a pris l’habitude de s’adapter aux changements (assurance maladie, franc fort…) et de garder la tête froide avec l’actualité (préférence nationale, bilatérales).
Comme la France et la Suisse diffèrent de plus en plus en matière politique, économique et sociale, le Frontalier compare et développe ses capacités d’analyse, d’anticipation et … sa résilience.
Le Frontalier de 2020 est préparé pour cette nouvelle année de mutation.

Voici 7 sujets qui vont retenir son attention et 7 résolutions pour 2020 : 

 

1- De l’actualité de la retraite… à la prévoyance

Un même samedi du début d’année, la France a abandonné l’âge pivot de la retraite à 64 ans alors qu’en Suisse, les jeunes Libéraux Radicaux (PLR) ont proposé d’augmenter l’âge de la retraite à 66 ans suivie d’une indexation sur l’espérance de vie.

Le Frontalier de 2020 voit diverger les systèmes de retraite des deux pays.
En France, pays en déficit généralisé, un projet de loi sur les retraites présenté tardivement met le feu aux poudres. En Suisse, pays avec une saine gestion des comptes publics et sociaux, il n’y a pas de tabou et de suspicion lorsque, très en amont, il est proposé de débattre sur “travailler plus pour gagner… pareil”.

Une bonne résolution du frontalier : faire un point sur sa prévoyance et sa future retraite

2- Des taux négatifs…  à la fin, qui paye?

Lorsque le Frontalier cherche à améliorer sa retraite, il constate que les taux d’intérêts négatifs ont raboté les rendements de la prévoyance de chaque côté de la frontière. La baisse des taux d’intérêts a tout d’abord été une opportunité pour les Frontaliers. Ils ont pu emprunter moins cher en euro et en franc suisse. Des Frontaliers qui avaient emprunté des francs suisses au taux LIBOR ont même poursuivi leur banque pour obtenir un paiement d’intérêt !

Aujourd’hui, les taux négatifs minent la rémunération de la prévoyance et récompensent l’endettement. Des comptes courants bancaires créditeurs sont prélevés d’intérêts et des prêts versent des intérêts !

Payer pour épargner, être payé pour emprunter, c’est le monde à l’envers !
Comme dans les parties de bonneteau, la question de la fin est, “qui va payer?” Christine Lagarde, nouvelle responsable de la BCE (Banque Centrale Européenne) présente sa vision : “On sera plus content d’avoir un emploi plutôt que d’avoir une épargne protégée”. Elle aurait donc choisi pour nous de préserver notre travail avec un taux d’intérêt négatif plutôt que de préserver notre épargne avec un taux positif.

Comme la BCE a décidé que ce ne seront pas les pays endettés qui vont payer, ce seront les particuliers économes qui payeront. Le Frontalier fait partie de ceux-ci. Entre la Suisse et la France, il travaille plus de 40 heures par semaine, économise en euro et en franc suisse et abonde à la prévoyance par capitalisation avec son 2ème pilier.

Des opposants s’expriment contre la poursuite de la baisse des taux d’intérêts. Une remontée plus rapide des taux d’intérêts en franc suisse par rapport aux taux d’intérêts en euro améliorerait le taux de change franc suisse / euro appliqué au salaire du frontalier, mais réduirait les exportations suisses et le nombre de postes de travail en suisse. Ces changements de taux pourront inciter des relocalisations d’épargne et des changements de prestataires financiers.

Une bonne résolution du frontalier : suivre l’évolution des taux d’intérêts négatifs, relocaliser son épargne

3- De la préférence nationale… à la formation

Début 2020, les premiers chiffres sur les effets de la préférence nationale suisse poussée par le parti de droite UDC ont étés publiés. Sur 200’000 recherches d’emploi, la nouvelle réglementation de la préférence nationale pour les activités à fort taux de chômage n’a “protégé” que 4’800 recherches de travailleurs résidents. La pertinence de cette réglementation n’est donc pas avérée.

Le vrai problème du chômage en Suisse n’est pas la concurrence des Frontaliers vis à vis des résidents. Comme le souligne la conférence annuelle de janvier 2020 du Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco), c’est l’inadéquation des demandes par rapport aux compétences requises de l’offre d’emploi qui est critique pour le chômage des résidents suisses. Faute de trouver une compétence localement, l’employeur étend sa recherche au bassin d’emploi Frontalier.

Une bonne résolution du frontalier : se former, se réorienter hors des professions au chômage élevé

4- De la stratégie syndicale… au parcours professionnel

En 2019, les syndicats suisses bloquent l’accord cadre avec l’Europe. Le “dumping salarial” n’y serait pas suffisamment empêché.
Dans le contexte d’économie ouverte de la Suisse, pour les Frontaliers qui voient leurs collègues licenciés et des postes se délocaliser, le message sur le dumping salarial des syndicats suisses apparaît tout aussi décalé avec le monde réel que le message de l’UDC sur la préférence nationale.

L’enjeu prioritaire ne serait pas l’éventuelle part de salaire en moins d’un frontalier comparé à un résident. L’enjeu prioritaire seraient les 50% à 80% de salaire en moins par rapport aux salariés “nearshore” (Europe de l’Est, Portugal) et “offshore” (Inde, Philippines, Malaisie).
Sans détailler ici les fausses économies des délocalisations, pérenniser son emploi Frontalier consiste à orienter son parcours professionnel sur des activités, des technologies, des projets, des départements liés à l’innovation et donc plus difficiles à délocaliser que des postes opérationnels de production.

Une bonne résolution du frontalier : sonder les sites d’emploi, identifier les opportunités moins « délocalisables »

5- De la passion climatique… au pare-brise du Frontalier

En 2011 déjà, les premiers articles du Blog du Frontalier traitaient de la mobilité douce. Depuis, nos sujets “mobilité” sont régulièrement mis à jour. En 2020 la prise de conscience a mûri. L’urgence climatique est objet d’actualité, de décisions politiques, d’occupations symboliques. Les jeunes vont au front pour un avenir préservé. La révolution verte s’est transformée en une “révolution culturelle” avec de jeunes “kmers verts” en première ligne…

Le Frontalier est une cible potentielle de cette passion verte. Il a un budget “mobilité” élevé. Il habite de plus en plus loin de son lieu de travail, souvent dans une maison individuelle pas toujours proche de transports en commun. Des réglementations limitent son télétravail. Il roule souvent en voiture et, pire, si il a suivi les incitations de l’Etat français des précédentes décennies, c’est du diesel qu’il consomme !

Mi janvier 2020, le canton de Genève a reproduit une réglementation française sur les pics de pollution. Le macaron de pare brise Stick’AIR, “cousin” de la pastille Crit’Air française, s’applique maintenant au canton de Genève et à tous les Frontaliers qui y circulent. Selon le volume d’émission du véhicule, la couleur-catégorie du macaron change. Les jours de pics d’émission dans la région, certaines catégories de véhicules seront interdites à la circulation.  Au delà de la nécessaire prise de conscience de la population, l’utilité de la réglementation Stick’Air peut être discutée. En effet, le site cantonal affiche une baisse des moyennes annuelles de particules en suspension “PM10” !

Cette réglementation fait partie des premières contraintes qui s’appliqueront aux Frontaliers. D’autres suivront… Il vaut mieux anticiper les changements réglementaires et fiscaux qui s’appliqueront sur sa mobilité plutôt que d’acheter maintenant un nouveau véhicule diesel et devoir le vendre rapidement avec une lourde perte.

Une bonne résolution du frontalier : anticiper les changements qui s’appliqueront sur sa mobilité

6- De l’humilité pro-climat… à l’amélioration continue

On assiste à la multiplication d’initiatives “décarbonées”. Plus elles sont nombreuses, plus il convient d’en évaluer leur portée. Quelque soit la grandeur de la cause, c’est l’humilité lors de l’évaluation des résultats obtenus qui permet leur amélioration continue. Tout comme l’utilité de la pastille Stick’Air peut être questionnée, les résultats des investissements dans le transport ferroviaire, dans le tram et dans les pistes cyclables ont une grande marge d’amélioration. L’importance de la question climatique nous impose d’être exigeants sur les résultats et de se remettre en question pour continuer à les améliorer.

A Genève, l’inauguration du CEVA-Léman Express s’est faite en grande pompe, mais côté français, la ligne était interrompue par la grève. Depuis, le volume attendu de voyageurs tarde à arriver : le Frontalier sait que son patron suisse n’est pas aussi compréhensif qu’un patron français pour des retards dus à une grève française. Une uniformité de statut des conducteurs du CEVA-Léman Express aurait aidé à assurer la continuité de service. Une grille tarifaire mieux ajustée entre les parcours français et suisses aurait aussi contribué à accélérer le passage de la voiture au train. Des parkings plus grands dans des gares françaises y auraient aussi contribué.

A Bâle, pour le Tram ligne 3 vers la France, ce sont des incivilités graves à la traversée d’un ” quartier difficile de Sant-Louis” qui rebutent à son utilisation au retour du travail…

La piste cyclable Annemasse-Genève « la voie verte » est critiquée pour sa largeur incompatible avec la vitesse d’un déplacement à vélo maison-travail-maison. La coexistence est difficile sur cet étroit bout de bitume de promeneurs, enfants, déambulateurs et cyclistes pressés par une contrainte horaire pour débuter le travail. Une réduction de la largeur dédiée à la promenade s’impose.

Le flot de cyclistes pressés le matin et le soir sur « la voie verte » confirme que le Frontalier n’est pas réfractaire aux mobilités douces transfrontalières. Les commentaires positifs des Frontaliers sur notre Forum vont dans ce sens. L’efficacité voudrait que le frontalier soit impliqué dans l’étude initiale et dans l’amélioration de ces initiatives pro-climat transfrontalières.

Une bonne résolution du frontalier : partager son retour d’expérience  sur les initiatives « pro-climat »

7- Des nuisances… au budget du Frontalier

Au delà des interdictions (d’utiliser son véhicule selon la couleur de son macaron  Stick’Air  etc), et du coût de la mutation verte, les futures décisions politiques vont traiter du paiement des nuisances. L’air pur est gratuit, qui va payer pour qu’il reste pur? L’eau est propre, qui va payer pour compenser sa souillure ? On entendra souvent le terme “d’externalité négative”, qui désigne la nuisance qu’une activité produit pour son environnement.

La prochaine mesure politique sur ce sujet concerne le transport aérien. Les chambres fédérales sont en train de finaliser une proposition de loi qui taxe 30 à 120 francs par billet d’avion au départ de Suisse. Ces taxes alimenteront un “Fond pour le Climat” utilisé pour prévenir les dégâts du changement climatique et encourager la recherche.

Ce type d’initiatives se multiplie en Suisse et en France. Les taxes et les factures pour ces nuisances vont être de plus en plus élevées. Le Frontalier risque de se voir cumuler les coût de compensation verte de France et de Suisse.

Une bonne résolution du frontalier : suivre l’effet des mesures écologiques compensatoires sur son budget

 

Et vous, avez vous identifié d’autres enjeux ? d’autres bonnes résolutions pour les Frontaliers en 2020 ?

 

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